news La reconstitution faciale de nos ancêtres préhistoriques constitue un exercice difficile puisqu’il se heurte à de nombreuses incertitudes. Peut-on néanmoins arriver au plus près de la réalité ?
Les reconstitutions des visages des hommes préhistoriques reposent sur les crânes et les ossements fossiles retrouvés au fil des décennies. Sur cette base, de nombreux chercheurs et artistes ont entrepris de représenter l’image la plus probable (selon eux) de ce à quoi devaient ressembler nos ancêtres. Problème : trop souvent, ces représentations renvoient certes à certains critères scientifiques, mais elles reposent aussi beaucoup sur l’imagination.
Primitif et sauvage - civilisé et moderne
Une équipe internationale s’est attelée à réaliser ce travail en respectant les impératifs de la rigueur scientifique et en s’appuyant sur les acquis les plus modernes de la médecine médico-légale et de l’informatique. Elle a travaillé sur deux australopithèques célèbres : Lucy (3,2 millions d’années) et l’enfant de Taung (2,6 millions d’années). Ces hominidés sont de lointains ascendants de l’homme moderne, sachant que l’espèce Homo sapiens s’est constituée voici environ 300.000 ans.
Comme l’expliquent les spécialistes, leurs recherches montrent que les reconstitutions réalisées jusqu’à présent reposent sur très peu de preuves solides pour les étayer. Ainsi, nombre de reconstitutions ont été influencées par des récits imaginaires sur ce qui est « primitif » et « sauvage » par opposition à ce qui serait « civilisé » et « moderne ». Un exemple bien connu : la représentation de Lucy évoluant dans la savane avec un compagnon et des enfants, alors que les données disponibles indiquent que le concept de petite cellule familiale est une construction très récente dans l’histoire de l’humanité.
Le moins de place à l'interprétation
Les chercheurs ont donc procédé au plus près des connaissances actuelles pour laisser le moins de place possible à l’interprétation (néanmoins inévitable). Ils proposent leurs propres reconstitutions qui associent les données scientifiques les plus récentes et le travail d’un artiste plasticien. La reconstitution faciale est loin d’être une science exacte, parce que bien des éléments manquent concernant en particulier les tissus mous, comme la peau, les muscles ou les yeux.
Ici, les spécialistes (informaticiens, médecins légistes, paléontologues…) ont notamment eu recours à un logiciel spécifique. Ils se sont appuyés sur les développements récents de l’analyse ADN, qui offre des possibilités exceptionnelles d’améliorer les techniques de reconstitution facile. Le gros problème, c’est que les échantillons d’ADN sont extrêmement difficiles à trouver et à exploiter après autant de temps. Mais d’autres approches moléculaires sont possibles (comme l’étude des polypeptides), et elles font l’objet d’intenses recherches. En tout cas, les chercheurs insistent sur le fait que dans ce domaine, et même si des incertitudes persistent, l’imagination doit laisser la place à la rigueur scientifique basée sur les connaissances les plus actualisées.
Reconstitution de Lucy (A) et de l’enfant de Taung (B). Ce type de reconstitution est basé sur ce que l’on sait de la fonction de la mélanine épidermique. (Campbell, Vinas, Henneberg and Diogo. Visual Depictions of Our Evolutionary Past: A Broad Case Study Concerning the Need for Quantitative Methods of Soft Tissue Reconstruction and Art-Science Collaborations. Frontiers in Ecology and Evolution)
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